Non, la Cour de justice de l'Union européenne n'exige pas la mise en liberté du séparatiste catalan élu député européen, Oriol Junqueras
Après que la Cour de justice de l'Union Européenne (CJUE) ait rendu, le 19 décembre 2019, sa décision reconnaissant l'immunité aux séparatistes catalans élus députés européens, la Cour suprême espagnole a refusé, dans une décision du 9 janvier 2020, de reconnaitre qu’elle protège Oriol Junqueras qu’elle avait condamné à treize ans de prison assortis d’inéligibilité, le 14 octobre 2019.
Tollé parmi les défenseurs de la cause indépendantiste, qui dénoncent une décision en infraction au droit communautaire, puisque les arrêts de la Cour de Justice de l’Union Européenne s’imposent aux juridictions nationales. Effectivement, une juridiction d’un état membre de l’Union européenne est tenue de respecter les décisions de la CJUE. Cela est incontestable. Comment dans ce cas, la Cour espagnole peut-elle conclure qu’Oriol Junqueras doit rester en prison malgré l’immunité qui lui est reconnue par la CJUE ?
Mais la question en l’occurrence n’est pas celle-là.
La question est : la décision de la CJUE a-t-elle pour conséquence qu’Oriol Junqueras doive être remis en liberté du fait de son immunité, comme le prétendent certains ? Et donc, il y a-t-il « une guerre des juges », la Cour suprême s’opposant ouvertement en violation des traités européens, à la CJUE ?
Et la réponse n’est pas si évidente que l’on veut nous le faire croire.
La décision de la CJUE établit qu’Oriol Junqueras bénéficie de l’immunité parlementaire dès la proclamation des résultats des élections européennes, le 13 juin 2019. Entre cette date, et celle de la décision de la CJUE, Oriol Junqueras a été condamné à de la prison ferme, ce qui n’aurait pas du se produire du fait de son immunité. Donc, il doit être libéré, nous expliquent ses défenseurs.
Cette analyse qui semble logique ne tient compte ni du droit européen ni du droit espagnol.
Tout d’abord, elle ne tient pas compte du fait que la CJUE ne se prononce à aucun moment sur la condamnation d’Oriol Junqueras et par conséquent n’ordonne pas sa mise en liberté (le contraire aurait été très surprenant). De la même façon, la décision de la Cour n’a pas pour conséquence que la justice espagnole doive cesser de poursuivre Carles Puigdemont et Toni Comin. D’ailleurs, le Parlement européen vient d’ouvrir l’instruction de la demande de levée d’immunité de ces deux députés à la suite de la demande qui lui a été faite par le Président de la Cour suprême espagnole le 13 janvier.