Un Brexit sans accord de plus en plus probable
Brexit: l’issue se rapproche. Sera-t-elle fatale ? Les deux parties se quitteront-elles sans avoir réglé leurs relations post divorce ? C’est possible, sans doute probable. Mais les négociateurs s’activent toujours dans l’espoir de trouver un accord dans la dernière ligne droite.
Pourtant rien ne semble avoir progressé. Les points de désaccord demeurent pratiquement inchangés : accès aux zones de pêche, règlement des différends et rôle de la Cour de justice de l’Union Européenne, et surtout respect de la concurrence équitable. Ce principe qui implique que le Royaume-Uni et l’Union Européenne respectent des règles sociales, environnementales, d'aides d'Etat équivalentes, se heurte à la volonté du Royaume-Uni de rester souverain pour choisir les règles qu’il veut appliquer. De son côté, l’UE ne veut pas donner au Royaume-Uni les armes pour faire une concurrence déloyale aux entreprises européennes.
Le Gouvernement anglais a fait miroiter le retrait des dispositions contraires à l'Accord du Brexit adopté en 2019 du projet de loi sur le marché intérieur actuellement en examen devant le Parlement britannique, en attente de concessions de l’UE. En fin de compte, Boris Johnson a annoncé le 8 décembre le retrait des dispositions controversées de la loi, sans doute dans l'espoir d'amadouer l'UE. Il reste à savoir si cela suffira car ce faisant, Boris Johnson ne fait que se conformer aux engagements pris dans l'Accord sur le Brexit, et à mettre fin à une situation anormale qu'il avait lui-même créée.
Alors que le Gouvernement anglais promet toujours des lendemains radieux une fois hors de l’Union Européenne (1), un nouveau rapport vient contrarier sa communication. Il est l’œuvre du Bureau pour la Responsabilité Budgétaire (Office for Budget Responsibility – OBR), un organisme financé par le Trésor pour donner des analyses sur les finances publiques qui contrebalancent les éventuelles positions trop optimistes des Ministres des finances anglais. Ce rapport confirme que, dans toutes les hypothèses (accord ou pas), le Brexit aura un impact négatif sur la croissance britannique par rapport à ce qu’elle aurait été si le Royaume-Uni était resté dans l’UE, cet impact négatif étant plus prononcé en cas d’absence d’accord.
Mais le Gouvernement lui-même n’est en réalité pas plus optimiste à présent que le 31 janvier 2020 s’approche. Le scenario qu’il avait envisagé, intitulé « Pire scénario vraisemblable pour les frontières à la fin de la période de transition le 31 décembre 2020 » ("Reasonable Worst Case Scenario for borders at the end of the transition period on 31 December 2020" ) devient plus probable. Annoncé dans un communiqué du 23 septembre dernier, sa version complète a (quelle coïncidence !) fuité dans les medias anglais il y a deux jours.
Quelques-unes des conséquences d’un no deal selon le scenario du Gouvernement britannique
Le tableau est sombre. Et, on le voit, la pression est clairement sur le Gouvernement de Boris Johnson.
Ce soir Boris Johnson dîne avec Ursula von der Leyen à Bruxelles. Il n'y aura sans doute pas de fish and chips et encore moins d'accord, sauf si le Royaume-Uni ou l'Union européenne accepte de faire des concessions importantes. Mais qui va, et qui peut, céder?
Mise à jour le 10 décembre 2020
Comme c'était prévisible, le diner d'hier soir a permis de constater...que les positions restent irréconciliables. Seul point d'accord: donner encore quelques jours aux négociateurs pour tenter d'éviter le no deal.
1 – La dernière intox du Gouvernement britannique sur le Brexit date du 2 décembre. Ce jour-là le Ministre de la Santé a déclaré que si le Royaume-Uni est le premier à vacciner contre le covid c'est parce qu'il a quitté l'Union européenne et ses pesanteurs bureaucratiques.
Mais c'est faux : le Royaume-Uni reste soumis aux règles européennes jusqu'à la fin de la période de transition c'est -à-dire jusqu'au 31 décembre 2020. Et l'affirmation du Ministre est démentie par la Directrice de l’agence britannique de régulation des médicaments britanniques qui rappelle que l'autorisation de la fourniture du vaccin a été permise par les dispositions du droit européen, qui prévalent jusqu'au 1er janvier.
Selon le droit communautaire, un vaccin doit être approuvé par l’agence du médicament européen préalablement à son utilisation par les Etats membres. Mais il existe la possibilité de se passer de cette approbation, de manière temporaire, et si un vaccin semble faire ses preuves. Le Royaume-Uni a tout simplement utilisé cette disposition du droit de l'UE