L'Union européenne ouvre les vannes des subventions pour la transition ecologique
Eolienne
Source : Parlement européen
Le droit de la concurrence de l’Union européenne impose l’encadrement des aides publiques pour que les entreprises soient placées dans des conditions équitables de concurrence sur tout le marché intérieur. Malheureusement, cette politique dont l’objectif peut se comprendre n’a pas toujours donné les résultats escomptés et a eu comme effet paradoxal de mettre les entreprises européennes en situation de faiblesse par rapport à leurs concurrents d’autres pays qui, eux, ont moins de scrupule à subventionner. C’est pourquoi récemment a été adopté un règlement de contrôle des subventions étrangères (RSE). Et, pour répondre aux subventions massives décidées par les Etats-Unis dans le cadre de l’Inflation Reduction Act (IRA), les états membres de l’UE ont décidé un assouplissement des règles sur les aides publiques.
Il s’agit, explique la déclaration du Conseil, de rendre les procédures « plus simples, plus rapides et plus prévisibles », et de « permettre de déployer rapidement un soutien ciblé, temporaire et proportionné » dans les secteurs stratégiques pour la transition écologique. En application de cette décision, la Commission européenne a publié de nouvelles règles, le 9 mars 2023. Elle modifient, d'une part, le règlement général d'exemption par catégorie (le «RGEC») qui permet des dérogations dans certains secteurs économiques. D’autre part, elles donnent plus de liberté aux Etats dans l'attribution d'aides dans les secteurs essentiels à la transition vers une économie à zéro émission (énergies renouvelables comme solaire et éolien), et à la décarbonation de l'industrie (hydrogène, électrification, efficacité énergétique). Certains investissements dans de nouvelles usines pourront bénéficier d’avantages fiscaux.
Principales caractéristiques du nouveau dispositif :
- Il s’agit d’un assouplissement temporaire (jusqu’au 31 décembre 2025)
- Les aides aux projets de petite taille et aux technologies nouvelles (ex : hydrogène renouvelable) sont simplifiées, par exemple en supprimant l’obligation de passer par une procédure de mise en concurrence, en prévoyant un relèvement des plafonds d'aide et une simplification du calcul des aides.
- De nouvelles mesures sont autorisées pour accélérer les investissements dans les secteurs ciblés. En complément des objectifs de la politique de cohesion de l’UE, les PME ou encore les entreprises établies dans des régions défavorisées peuvent bénéficier d'une aide plus importante. Autre exemple : si l'aide est octroyée sous la forme d'avantages fiscaux, de prêts ou de garanties, le pourcentage de coûts d'investissement qu’elle représente est encore plus élevé.
- Ce dispositif ne concerne que l’UE et non l’Espace Economique Européen (EEE) qui se voit traiter comme un espace étranger : avant d’attribuer la subvention, les états doivent vérifier qu’il n’y a pas de risque que l’investissement soit réalisé dans l'EEE et s'assurer de l'absence de risque de délocalisation dans cet espace. Toujours pour éviter les délocalisations, les Etats pourront attribuer des subventions plus élevées s’il existe « un risque réel de détournement des investissements hors d’Europe ». Cette entrée dans la « guerre » mondiale des subventions est un changeent d'attitude de l’UE dans ses relations avec les pays tiers, le signe qu’elle ne veut plus se laisser distancer dans cette nouvelle compétition internationale de la transition écologique.
Mais l’UE est divisée en plusieurs camps, ce qui entrâve sa capacité d'action. D’une part, il existe la traditionnelle opposition entre les états acquis au libre marché (donc hostiles aux aides) et les autres. A cela s’ajoute la crainte des pays moins « riches » de subir la concurrence de ceux qui comme l’Allemagne ou la France auront les moyens de davantage subventionner leurs entreprises.
Une solution pourrait être trouvée avec le Fonds de souveraineté proposé par la France et l’Italie. Il consisterait à investir dans la recherche ou le capital d'entreprises stratégiques grâce à des financements communs. Mais des pays comme l'Allemagne, les Pays-Bas ou la Suède s’y opposent car ils refusent une augmentation de leur contribution au budget communautaire. Dans l’immédiat, l’UE peut tabler sur les fonds du programme NextGenerationEU déjà très conséquents.