Chasse aux économies de gaz dans l’Union européenne - 1ere partie
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Résilience énergétique : l’expression est à la mode dans l’Union européenne. Elle signifie que l’ère de l’approvisionnement en énergie facile est terminée et que l’Union européenne doit revoir sa politique énergétique. La guerre déclarée par la Russie à l’Ukraine et les sanctions qui ont suivi plongent l’Europe dans une zone d’incertitude. Rappelons que la Russie représentait jusqu'à l'an dernier quelque 40% des importations gazières de l'UE. Gazprom a annoncé, le 25 juillet, la réduction à 20% de ses livraisons quotidiennes via le gazoduc Nord Stream, en invoquant une opération de maintenance sur une turbine (un motif contesté par les européens).
Comment compenser la réduction de l’approvisionnement en gaz russe ? C’est la question qui taraude les décideurs européens. Pour y répondre, la chasse au gaspi est de retour. C’est ce qui ressort du plan de réduction de la consommation de gaz adopté par le Conseil de l’Union européenne à la majorité qualifiée, le 26 juillet 2022. Il reprend la proposition de la Commission européenne qui prévoit une réduction de 15% de la consommation de gaz dans l’UE.
Que contient le règlement adopté par le Conseil ?
Chaque pays doit faire "tout son possible" pour que, sur la période entre août 2022 et mars 2023, sa consommation de gaz soit diminuée d'au moins 15% par rapport à la moyenne des cinq dernières années sur la même période.
Les quantités de gaz économisées seront exportées aux pays dans le besoin. Pour atteindre l’objectif de réduction de la consommation, les états définissent librement les mesures à mettre en place, l’UE n’intervenant que comme instance de coordination.
La proposition de la Commission distingue les consommateurs protégés des autres. Dans le premier groupe se trouvent les ménages privés qui doivent, autant que faire se peut, être protégés contre les pénuries. Ils sont cependant appelés à faire des efforts en réduisant la consommation inutile et en évitant le gaspillage d’énergie. Dans le second groupe, les états devront classer par ordre de priorité les clients ou les installations les plus critiques en fonction de l’impact social de l’activité (santé, alimentation, sureté, sécurité, raffineries et la défense, ainsi que pour la prestation de services environnementaux), du caractère transfrontière des chaînes d'approvisionnement, des dommages qui pourraient être causés aux installations (pour éviter les ruptures de production)…
L’incitation devient obligation en cas de "risque de grave pénurie". Un mécanisme d'alerte rend contraignante la réduction de 15%. Mais cette obligation pourra être adaptée en fonction de la situation de chaque pays. Par exemple, une exemption est prévue pour les états insulaires comme Chypre, l’Irlande, Malte qui ne sont pas interconnectés aux réseaux de gaz des autres pays. Une exemption pourrait être également accordée à l'Estonie, la Lettonie et la Lituanie historiquement reliées au réseau électrique russe et qui de ce fait pourraient pâtir d’une pénurie de gaz à tout moment.
Un texte remanié
Par rapport à la proposition de la Commission, le texte sur lequel s’est accordé le Conseil laisse plus de liberté aux états. Qu’il s’agisse de la mise en oeuvre de l’objectif de réduction de 15% ou des exemptions et dérogations prévues (plus nombreuses dans le règlement adopté par le Conseil). Ces dérogations pourraient permettre à certains États de faire des économies de consommation qui se situeraient sous la barre des 10%. Il s’agit par exemple, des pays qui sont mal reliés aux autres États membres et qui exportent du gaz naturel liquéfié (GNL) au "maximum" de leurs capacités. Une autre dérogation bénéficiera aux pays qui dépassent l'objectif de stockage de gaz à l'échelle de l'UE, à titre de "récompense", en quelque sorte, des efforts qu’ils ont réalisés. Pour éviter le risque d'une crise de l'approvisionnement en électricité, des dérogations s’appliqueront également être invoquées par les pays dont les réseaux électriques ne sont pas synchronisés avec le système électrique européen
Enfin et surtout, le mécanisme d’alerte sera déclenché, non pas par la Commission européenne, comme le prévoyait la proposition, mais par le Conseil de l'UE, donc par les Etats.