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FAQ Libre circulation - Liberté d'établissement

Dernière mise à jour: 21 avril 2020



ETABLISSEMENT D'UNE SUCCURSALE PAR UNE SOCIETE SANS ACTIVITE EFFECTIVE

La société Centros établie au Royaume-Uni est en conflit avec le Ministre du commerce du Danemark qui lui refuse l'immatriculation d'une succursale dans ce pays. Depuis son enregistrement, Centros n'a exercé aucune activité.

Cette constatation a conduit le Ministre à en conclure que Centros a pour objectif réel, non de constituer une succursale, mais un établissement principal en échappant aux règles danoises et notamment celles prescrivant la libération d'un capital minimal.

La position du Danemark est condamnée par le juge communautaire,car contraire aux articles 52 (devenu 43) et 58 (devenu 48) du traité CE sur le droit d'établissement. Un état ne peut donc pas refuser l'immatriculation d'une succursale d'une société légalement constituée dans un autre état membre. Cette interprétation n'exclut pas cependant que les autorités de l'état d'établissement puissent prendre des mesures pour prévenir ou sanctionner d'éventuelles fraudes.
(arrêt du 09/03/1999, aff.C-212/97, bull.07/1999)

 

AGENT COMMERCIAL INDEPENDANT EXERCANT SON ACTIVITE DANS UN ETAT MEMBRE DONT LE COMETTANT EST DANS UN PAYS TIERS

Le statut des agents commerciaux indépendants a fait l'objet d'une directive de coordination des droits des états membres (directive 86/653 du 18/12/1986). Elle s'applique dès qu'un agent commercial a exercé son activité dans un état membre, même si son commettant est établi dans un pays tiers et que le contrat d'agence les liant stipule la compétence de la loi du pays tiers.

La Cour de Justice des Communautés Européennes a fait application de ce principe dans un litige qui opposait une société établie au Royaume-Uni (l'agent) à une société californienne (son commettant) à la suite de la cessation du contrat d'agence qui les liait. L'enjeu en était le droit à un dédommagement de la première, droit prévu par les articles 17 et 18 de la directive, contrairement à la loi californienne qui régissait le contrat en vertu d'une clause de celui-ci.
(arrêt du 09/11/2000, aff.C-381/98, bull .29/2000)

ASSIETTE DE LA CONTRIBUTION A LA FORMATION PROFESSIONNELLE

La législation hongroise impose à une société ayant son siège social sur son territoire et une succursale en République tchèque de payer la contribution à la formation professionnelle, dont le montant est calculé sur la base de ses coûts salariaux, en incluant dans l’assiette les coûts relatifs à la succursale. Cette législation viole le principe de libre circulation et le droit d’établissement si, dans la pratique, la société ne peut bénéficier, au titre de la succursale, des réductions possibles de sa contribution prévues par la législation nationale. Cette impossibilité place la société en question dans une situation moins favorable que celle d'une société qui n’est active que sur le territoire hongrois. Et par conséquent, elle peut la dissuader de mettre à profit la liberté d’établissement prévue par le traité.

CJUE, 15 avril 2010, aff. C-96/08, CIBA Speciality Chemicals Central and Eastern Europe Szolgáltató, Tanácsadó és Keresdedelmi kft contre Adó- és Pénzügyi Ellenőrzési Hivatal (APEH) Hatósági Főosztály
 

DEGREVEMENT FISCAL

La société Philips Electronics UK a sa résidence fiscale au Royaume-Uni. Elle fait partie du groupe Philips, dont la société mère finale est établie aux Pays‑Bas. Cette dernière a constitué avec un groupe sud‑coréen, LG Electronics, une entreprise commune. Cette entreprise commune dispose d’une filiale néerlandaise, LG Philips Displays Netherlands BV qui a un établissement stable au Royaume-Uni. Philips Electronics UK a cherché à imputer sur ses propres bénéfices une partie des pertes subies par l’établissement stable établi au Royaume-Uni pour les exercices 2001 à 2004. Mais les autorités fiscales britanniques ont refusé sa demande estimant que les pertes de LG.PD Netherlands pouvaient être imputées sur les bénéfices de cette dernière aux Pays-Bas.

En vertu de la loi britannique, Philips Electronics UK ne pouvait procéder à l’imputation des pertes   de LG.PD Netherlands sur ses bénéfices qu’à la condition qu’il ne lui soit pas possible de le faire lors d’une imposition dans un autre pays membre.  Mais le transfert des pertes subies au Royaume-Uni par une société résidente n’est soumis à aucune condition équivalente.

Cette différence de traitement constitue une restriction à la liberté d’établissement d’une société non-résidente de s’établir dans un autre État membre dans la mesure où elle rend moins attrayant son exercice.
Les motifs invoqués par l’état britannique pour justifier cette mesure, à savoir éviter la double prise en compte des pertes et de la préserver une répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les états membres ne peuvent pas être considérés comme des raisons impérieuses d’intérêt général qui, elles, peuvent justifier des restrictions à la liberté d’établissement.

CJUE, 6 septembre 2012, aff. C-18/11, The Commissioners for Her Majesty’s Revenue & Customs contre Philips Electronics UK Ltd


Voir aussi l’affaire similaire dans laquelle une législation fiscale nationale qui autorise la déduction des pertes subies par une filiale résidente mais l'exclut pour une filiale non-résidente a été jugée conforme au droit communautaire. Le juge a reconnu qu’ « elle poursuit des objectifs légitimes compatibles avec le traité et relevant de raisons impérieuses d’intérêt général, tels que la nécessité de préserver la répartition du pouvoir d'imposition entre les états membres et de faire obstacle aux risques de double emploi des pertes ainsi que d'évasion fiscale ».

CJUE, 21 février 2013, aff. C-123/11, A Oy
 

IMPOT SUR LA FORTUNE

En vertu du principe de liberté d’établissement, une législation nationale ne peut pas subordonner le bénéfice d’une réduction de l’impôt sur la fortune à la condition de rester assujetti à cet impôt durant les 5 ans qui suivent. Ainsi, une société qui transfère son siège social vers un autre état membre peut bénéficier de cette réduction pour l’année où elle était imposable dans l’état membre d’où elle est partie.

CJUE, 6 septembre 2012, aff. C-380/11, DI. VI. Finanziaria di Diego della Valle & C. SapA contre Administration des contributions en matière d’impôts
 

IMPOT SUR LES REVENUS DE CAPITAUX

En appliquant des règles moins favorables pour l’imposition des revenus de capitaux et de biens mobiliers aux sociétés d’investissement non résidentes qui ne disposent pas d’un établissement stable sur son territoire, la Belgique viole le droit communautaire, et notamment le droit d’établissement.

CJUE, 25 octobre 2012, aff.C-387/11, Commission européenne contre Royaume de Belgique
 

DEGREVEMENT FISCAL

Damixa, une entreprise danoise, était présente sur le marché allemand en 2005 et 2006 par l’intermédiaire de sa filiale allemande, Damixa Armaturen, qu’elle détenait à 100%. Cette dernière a connu des pertes importantes qui ont été comblées principalement grâce à des prêts de Damixa moyennant intérêt. Damixa Armaturen n’a pas déduit ces charges d’intérêts de ses résultats fiscaux en Allemagne, au motif qu’elles constituaient des bénéfices distribués non déductibles selon la réglementation allemande limitant le droit à déduction en cas de sous-capitalisation. Dans sa déclaration fiscale, Damixa n’a pas déclaré ces produits, à savoir les revenus d’intérêts, dans ses résultats imposables, au motif que les règles danoises sur l’imposition des intérêts perçus étaient contraires au droit de l’Union, un avis non partagé par les autorités fiscales danoises.

Le litige porté devant la Cour de Justice de l’Union Européenne, celle-ci donne raison à Damixa.
Une loi nationale ne peut pas accorder à une société résidente une exonération fiscale pour les intérêts versés par une filiale résidente, lorsque cette dernière n’a pas pu déduire la charge correspondante en raison des règles limitant le droit à déduction des intérêts versés en cas de sous-capitalisation, et exclure l’exonération qui résulterait de l’application de sa propre législation concernant la sous-capitalisation quand la filiale est résidente dans un autre État membre.

CJUE, 21 décembre 2016, aff.C-593/14, Masco Denmark ApS, Damixa ApS contre Skatteministeriet

 

ABATTEMENT FISCAL

Un citoyen néerlandais conteste le refus de l'administration fiscale des Pays-bas de lui accorder un abattement fiscal en matière d'impôt sur la fortune. Possédant la totalité des actions d'une société de droit irlandais établie à Dublin, il a demandé à bénéficier des avantages offertes par la loi fiscale des Pays-Bas en cas de participation substancielle au capital d'une société. Le rejet de sa demande a été motivé par le fait que la société en question n'était pas établie aux Pays-Bas.

La Cour déclare la loi néerlandaise incompatible avec l'article 52 (devenu article 43) du traité de la Communauté Européenne qui interdit les restrictions à la liberté d'établissement. En effet, la loi en cause accorde un traitement inégal aux investissements dans des sociétés selon que celles-ci sont établies on non aux Pays-Bas : dans le premier cas, des abattements sont possibles, dans le second, non.
(arrêt du 13/04/2000, aff.C-251/98, bull.13/2000)

 

IMPOSITION DE DIVIDENDES

Saint-Gobain ZN est une succursale de Saint-Gobain SA en Allemagne. Conformément à la loi allemande, Saint-Gobain SA est soumise dans ce pays à une obligation fiscale limitée car son siège est situé dans un autre état. Saint-Gobain SA réclame à l'administration fiscale allemande de bénéficier des avantages fiscaux relatifs à l'imposition des dividendes provenant de participations à des sociétés de capitaux étrangères. Sa demande est rejetée au motif que ces avantages sont réservés aux entreprises soumises à une obligation fiscale illimitée.

La position de l'administration allemande est jugée contraire au droit communautaire : un établissement stable situé dans un état membre et exploité par une société ayant son siège dans un autre état membre doit bénéficier des mêmes conditions que les sociétés de même forme juridique ayant leur siège dans le premier état. Peu importe que l'établissement bénéficie par ailleurs d'un régime d'imposition favorable qui, selon l'administration fiscale, compenserait les désavantages résultant du refus contesté.
(arrêt du 21/09/1999, aff.C-307/97, bull.23/1999)

 

DEDUCTION DES PERTES PROFESSIONNELLES

L'administration belge a refusé à la société AMID de pouvoir déduire les pertes subies durant les exercices antérieurs du bénéfice réalisé durant l'exercice suivant au motif que ces pertes auraient du être déduites des bénéfices réalisés par l'établissement luxembourgeois d'AMID au cours de l'exercice comptable antérieur.

La question est de savoir si une telle réglementation est conforme à l'article 52 (devenu article 43) du traité CE dans la mesure où la déduction refusée serait admise si les établissements de la société AMID étaient exclusivement situés en Belgique.

A cette question, la Cour de Justice des Communautés Européennes répond par la négative. En l'absence d'une diférence de situation objective, la différence de traitement ainsi instaurée au détriment des sociétés ayant exercé leur droit de créer des établissements dans d'autres états membres est contraire au droit communautaire.
(arrêt du 14/12/2000, aff.C-141/99, bull.34/2000)

 

 

DISCRIMINATION AUTORISEE


Le régime national d’autorisation d’exploitation des pharmacies applicable en Finlande permet à l’université d’Helsinki d’avoir une pharmacie dans la ville d’Helsinki et donne le même droit à l’université de Kuopio dans cette ville. Mais dans le cas des universités, le régime d’autorisation d’exploitation est plus favorable que celui applicable aux pharmacies privées.

Cependant, cette différence de traitement peut se justifier dans la mesure où les succursales de ces pharmacies universitaires participent effectivement à l’accomplissement des missions spécifiques relatives à l’enseignement dispensé aux étudiants en pharmacie, à la recherche dans le domaine de l’approvisionnement en médicaments ainsi qu’à la réalisation de préparations pharmaceutiques rares.

Il faut signaler que cette décision est particulière dans la mesure où elle concerne une espèce dont tous les éléments se cantonnent à l’intérieur d’un seul état membre, et qui de ce fait ne relève pas en principe de la compétence de la CJUE. Cette dernière accepte cependant de se reconnaitre compétente au motif que sa réponse « peut être néanmoins utile à la juridiction de renvoi, notamment dans l’hypothèse où le droit national lui imposerait, dans des procédures telles que celles en cause au principal, de faire bénéficier un ressortissant finlandais des mêmes droits que ceux qu’un ressortissant d’un autre État membre tirerait du droit de l’Union dans la même situation ».

CJUE, 21 juin 2012, aff. C-84/11, Marja-Liisa Susisalo, Olli Tuomaala, Merja Ritala, en présence de: Helsingin yliopiston apteekki
 

 

 

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Jurisprudence

 

  • Commentaires de décisions de la Cour de Justice de l'Union Européenne et d'arrêts du Tribunal,
  • Conclusions des avocats généraux

 

 

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